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Troubles oppositionnels et méthodologies adaptées

Pour ce cours, nous avons été amenés à faire un travail de recherche sur les habiletés sociales et le jugement moral. Nous avons aussi dû choisir une méthode pour aider des enfants/adolescents avec des troubles oppositionnels. Nous avons dû présenter celle-ci de manière originale à la classe. 
Ci-dessous, vous retrouverez donc notre travail sur les habiletés sociales et le jugement moral. 
Après cela, vous pourrez prendre connaissance de la méthode que nous avons choisie : la micro-intervention morale. Vous pourrez également visionner la vidéo que nous avons réalisée à ce sujet.
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Pour télécharger le travail en format PDF, rendez-vous en bas de la page...
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Les habiletés sociales

Selon Henggeler, professeur américain de psychiatrie et de sciences du comportement, les habiletés sociales sont « les comportements nécessaires pour entretenir des interactions fructueuses à l’école, à la maison et dans toute communauté ».

Brown (2003) rejoint cette définition en définissant les habiletés sociales comme « la capacité de démontrer un comportement approprié dans une variété de contextes comme à la maison, à l’école ou au travail et dans la société en général. »

Selon Michelson et al (1986) les habiletés sociales possèdent différentes composantes, caractéristiques :

- elles sont principalement développées par apprentissage (observation, modelage, etc.) ;

- elles comprennent des comportements spécifiques (et discrets), verbaux et non verbaux ;

- elles se composent de réponses appropriées et efficaces ;

- elles renforcent les rapports sociaux ;

- elles impliquent des réactions efficaces et appropriées.

 

La compétence sociale générale d’un individu dépend donc de différentes habiletés sociales.

Comme habiletés sociales nous pouvons citer le respect de la prise de parole, présenter ses excuses, formuler une demande, donner et recevoir un compliment, ressentir et exprimer ses sentiments, aider autrui, écouter, tenir une conversation, etc.

Dans la suite de ce travail, nous avons décidé de développer l’estime de soi, le sentiment d’efficacité personnelle, la cognition sociale et la résolution de problèmes interpersonnels à l’aide de notre lecture du document « les troubles du comportement, la compétence sociale et la pratique d’activités physiques chez les adolescents » de Gendron M., Royer E., Bertrand R. et Potvin P. (2005).

 

Commençons par l’estime de soi. Chez les adolescents, par exemple, celle-ci est liée à la santé physique et mentale, à l’attachement qu’a l’individu avec sa famille et aux relations positives qu’il entretient avec les autres. L’estime de soi du jeune dépend aussi de sa réussite scolaire et de sa résilience envers les événements stressants qu’il pourrait rencontrer, c’est à dire sa capacité à y faire face.

Le manque d’estime de soi est souvent un indicateur de problèmes de comportement et d’un faible niveau d’habiletés sociales.

 

Ensuite, parmi les habiletés sociales, il y a également le sentiment d’efficacité personnelle, c’est à dire la vision que l’on a de pouvoir agir et atteindre, ou non, les objectifs que nous avons.

 

Un autre élément qui influence la compétence sociale est la cognition sociale, c’est à dire la capacité à se mettre à la place des autres et à imaginer leurs sentiments. Cette capacité permettra alors à l’individu d’interpréter les intentions de l’autre et d’adapter ensuite son propre comportement.

 

Toujours parmi les habiletés sociales et en lien avec cette cognition sociale, la capacité à résoudre des problèmes interpersonnels est également importante. Pour qu’une personne soit capable de résoudre des problèmes qui concernent d’autres personnes, il faudra qu’elle soit capable de faire différentes actions : identifier le problème, imaginer des solutions pouvant le résoudre, fixer les objectifs qu’elle vise et prendre conscience ensuite des conséquences que ses actions pourraient engendrer.

 

Les jeunes ayant des troubles du comportement, des troubles oppositionnels ont des difficultés au niveau de tous les éléments développés ci-dessus. Ils ont, en effet, généralement, une faible estime d’eux-mêmes, une difficulté à se mettre à la place des autres, à résoudre des problèmes qui concernent d’autres personnes, ils ont une faible empathie, etc. Ils ont donc, de manière générale, une compétence sociale assez faible, c’est à dire des habiletés sociales limitées qui entrainent des relations sociales inadaptées.

 

C’est pour cela que plusieurs programmes ont été imaginés avec comme objectif d’entrainer les enfants ou les adolescents aux habiletés sociales et pouvoir ainsi les habituer à des comportements qui soient adaptés socialement.

Le jugement moral

Les dilemmes moraux répondent à des critères de nature morale et de nature légale. 3 niveaux agencent cette approche, chacun des niveaux étant divisés en deux stades :

  • La moralité « pré-conventionnelle » où la personne agit en fonction de ses intérêts personnels et des risques encourus. Au stade 1, l’individu veut éviter à tout prix la punition physique et se soumet à l’autorité. Au stade 2, l’individu tente de répondre à ses besoins par l’échange de faveurs.

  • La morale « conventionnelle » où la logique du groupe prédomine. A ce niveau, l’ambition est de satisfaire les attentes interpersonnelles du groupe de référence (groupe proche), premièrement, et de satisfaire aux attentes de la société en général, deuxièmement. Au stade 3, l’individu cherche à aider les autres et à leur faire plaisir afin de gagner leur approbation. Au stade 4, l’individu maintient les règles et les normes qui sont acceptées socialement.

  • La morale « post-conventionnelle » relativise la référence aux normes collectives. Dans le stade 5, le droit des individus dépasse le besoin du maintien de l’ordre social. Finalement, dans le stade 6, les décisions morales de l’individu reflètent les principes éthiques universels de respect mutuel, de confiance et de justice. 

On ne peut pas qualifier de « délinquant par nature» la personne se trouvant dans le stade préconventionnel. Toutefois, l’individu se situant dans ce niveau n’éprouve pas d’intérêt à se conformer à de quelconques règles et ainsi si le lien avec les milieux conventionnels est fort, le danger sera moins grand que l’individu commette un acte délinquant.
Par contre, pour être moral, l’individu post-conventionnel ne doit pas nécessairement se sentir lié aux milieux conventionnels. En effet, l’individu est capable d’agir en fonction de principes moraux intégrés. Finalement, l’individu se situant dans le stade conventionnel attache trop d’importance aux attentes du milieu et des autorités et risque donc de transgresser les principes supérieurs qui sont pour lui insensés.

Kohlberg met l’accent sur un facteur de maturation lié au jugement moral. En effet, chaque tranche d’âge détient sa façon bien à elle de comprendre le monde socio-moral. Ainsi, le processus de maturation morale se définit par « la possibilité progressive de tenir compte des intentions et du point de vue d’autrui dans la manière d’apprécier un acte » (Debuyst, 1985). La règle est donc à inventer comme sens qui s’impose ou à réinventer en fonction des problèmes, des choix auxquels l’individu est confronté. Il est donc primordial de considérer la maturation comme une activité intellectuelle se construisant à travers les interrelations sociales.

La micro-intervention morale

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Définition

Nous avons choisi de travailler sur une méthode cognitivo-développementale, inventée par Blatt en 1960 : la micro-intervention morale. Cette méthode permet de développer le jugement moral des enfants, des adolescents et des adultes ayant un trouble du développement et étant placés en institution.

Cette intervention est basée sur des discussions qui se font en groupe et qui partent de dilemmes moraux. L’objectif est alors d’amener les participants à un retour réflexif en leur demandant de justifier leurs choix et d’expliquer la solution qu’ils choisiraient face au problème moral présenté. Le but principal de la méthode est de stimuler le développement critique des individus et ainsi les faire progresser vers un stade de jugement moral plus avancé.

 

Les étapes

La micro-intervention se déroule en plusieurs étapes.

La première étape est la période de sensibilisation. Durant cette phase, la personne qui va réaliser l’intervention prend le temps de découvrir les personnes avec qui elle va travailler et les membres du personnel, elle observe certaines activités et explique aux futurs participants en quoi consiste la méthode et quels sont ses objectifs.

 

La seconde étape est l’administration des questionnaires. Cette étape a comme objectif d’identifier le stade de raisonnement moral dans lequel se trouvent les participants. La phase d’administration des questionnaires est séparée en deux moments : la phase pré-test et la phase post-test.

La phase pré-test concerne les questionnaires servant à récolter les informations générales (anamnèse) et le questionnaire de réflexion sociomorale. Ces formulaires sont complétés par les participants durant le mois qui précède l’intervention. Parfois, l’anamnèse doit être complétée à l’aide du dossier scolaire de l’enfant, par exemple lorsqu’il ne connaît pas l’emploi de ses parents, ...

L’animateur sera attentif à voir chaque participant individuellement afin de s’assurer qu’ils aient tous complétés l’entièreté du questionnaire et qu’ils aient bien compris les questions.

La phase post-test se passe durant les sept semaines qui suivent l’intervention. Durant cette période, les participants sont invités à remplir à nouveau les questionnaires.

 

Vient ensuite la troisième étape, c’est à dire la phase d’intervention. Durant cette période, les participants vivent plusieurs activités lors desquelles ils vont avoir l’occasion de développer leur réflexion à partir de dilemmes moraux. L’animateur de ces ateliers aura suivi préalablement une formation sur la réflexion sociomorale.

Il est également important, pour que ces activités se déroulent au mieux et qu’elles soient bénéfiques pour les participants, que des règles soient élaborées. Cela permettra de mettre tous les participants en confiance et de créer un climat dans lequel tout le monde partage les responsabilités.

Un système de points peut également être mis en place. Pour ce faire, les participants sont invités à remplir une auto-évaluation à la fin de chaque intervention. Ils évalueront ainsi leur participation et le respect des différentes règles. Une évaluation entre les participants peut également être organisée. Cela stimulera l’intérêt des enfant (ou des adultes) et favorisera leur motivation et leur participation.

 

A la fin de chaque discussion sur un dilemme moral, un jeu de rôle sera organisé afin de permettre aux participants de comprendre les enjeux moraux et de s’imaginer vraiment dans la situation.

 

Les objectifs

Les objectifs de la micro-intervention sont nombreux. Cette intervention vise principalement le développement d’habiletés de raisonnement logique dans le but d’amener les participants à un stade moral supérieur.

Grâce aux différentes activités réalisées, les capacités de base nécessaires pour participer à des discussions en groupe vont également être développées.

Différentes connaissances sur les sujets travaillés vont être acquises et la connaissance de soi ainsi que l’estime de soi vont également s’améliorer au cours de l’intervention.

 

Les conditions

Pour que la micro-intervention se déroule au mieux et soit fructueuse, certaines conditions doivent être respectées.

 

Tout d’abord, il est primordial qu’un déséquilibre, un conflit cognitif ait lieu pour stimuler le jugement moral.

Pour cela, l’animateur doit chercher à provoquer ce conflit cognitif par le questionnement structural, des dilemmes moraux et la confrontation à des raisonnements d’un stade adjacent supérieur (exposer les participants à d’autres participants étant au stade de développement moral directement supérieur). 

Cette stratégie est appelée « stratégie +1 » ou « intervention +1 stade ».

 

Ensuite, il est important que les participants explicitent les raisons de leur choix, qu’ils argumentent, donnent des explications sur leurs propos.

L’animateur doit donc veiller à encourager les participants à expliciter dans toutes les circonstances les raisons de leur choix mais également encourager à accepter le point de vue de leurs pairs (tout en laissant les participants réagir en justifiant leur position s’ils sont en désaccord). Il est important que les échanges restent interactifs et critiques afin d’amener un progrès au niveau des stades moraux.

Pour tout cela, il est important que l’animateur donne des opportunités de prise de parole et qu’il promeut l’interaction entre les élèves dans une atmosphère d’ouverture et d’échange.

La micro-intervention doit donc être bien conduite ; elle demande un investissement aussi bien des participants que de l’animateur.

 

De plus, il est important que cette intervention soit conduite pendant une période de minimum 20 semaines. C’est donc une méthode qui s’utilise dans la durée.

 

Enfin, il est primordial que les groupes soient composés d’enfants ou d’adolescents étant à des stades de jugement moral différents (afin qu’un déséquilibre cognitif se crée pour stimuler le jugement moral et donc que l’intervention ait lieu d’être).

L’animateur doit donc veiller à ce que les groupes soient bien équilibrés, qu’ils soient bien réfléchis avant de commencer l’intervention.

 

Les résultats des études

Pour que les résultats soient satisfaisants, il est nécessaire que la méthode soit bien conduite et qu’elle dure environ 20 semaines.

Selon l’étude autour de laquelle nous avons travaillé, seuls les sujets faibles, non délinquants, (des classes régulières et d’adaptation) ont progressé. La progression est de plus d’un tiers de stade, en moyenne, entre le début et la fin de l’intervention, alors qu’aucune progression n’a été remarquée sur le jugement moral des sujets forts. Les résultats sont donc mitigés.

Ce qui pourrait expliquer que ces résultats soient non significatifs est le faible échantillon de personnes testées. Un autre élément qu’il est important de garder en mémoire est le fait que l’intervention se fasse sur une longue durée (20 à 25 semaines). Il y a donc une maturation naturelle parmi les progrès qu’on fait les participants.

De manière générale, les différentes études confirment néanmoins bien que l’intervention GDM peut stimuler le jugement moral des élèves, en classe régulière ou d’adaptation, délinquants ou non.

Les effets bénéfiques sont donc bien présents sur le raisonnement cognitivo-moral des participants. Par contre, il n’est pas possible de vérifier si ces bienfaits sont acquis à court terme ou non, mais nous pouvons supposer que oui. En effet, étant donné que l’intervention a duré longtemps, nous pouvons imaginer qu’un changement structural dans le raisonnement moral a eu lieu et qu’il ne s’agit pas uniquement d’une mémorisation à court terme.

Enfin, les études ont également démontré que le comportement social des participants avait également progressé, à court et à plus long terme.

Sources : 

Gendron, M., Royer, É., Bertrand, R., & Potvin, P. (2005). Les troubles du comportement, la compétence sociale et la pratique d’activités physiques chez les adolescents. Revue des sciences de l'éducation, 31(1), 211-233.

 

Desbiens, N., & Bowen, F. (2011). Les défis de la formation initiale et continue dans l’intervention auprès des jeunes en difficulté de comportement. Formation et Profession, 18(3), 20-23.

 

Dionne, J. (1996). L’intervention cognitive-développementale auprès des adolescents délinquants. Criminologie, 29(1), 45-70.

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Debuyst, C. (1985). Jugement moral et délinquance. Les diverses théories et leur opérationalisation. Kohlberg — ses études comparatives. In: Déviance et société. - Vol. 9 - N°2. pp. 119-132.

 

Frère, S. (2018). Troubles oppositionnels et méthodologies adaptées. Syllabus. Haute École de Bruxelles.

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